CAMINO, PACO.
Tomó la alternativa el día 17 de marzo de 1960 de manos de Jaime Ostos.
Le llamaron el niño sabio de Camas. Los años setenta son suyos en las Ventas, tras haber hecho una anterior década irregular en esta plaza. Camino tenía una pasmosa facilidad pero también una pertinaz abulia, llámese mandanga, que le servía para compensar la pasmosa sabiduría con que le dotó la madre naturaleza. Esto decía de el Díaz Cañabate. Siempre en las Ventas, por San Isidro: en el 71 cuaja un toro de Pablo Romero llamado Serranito, muy noble; En el 72 le piden los madrileños un rabo de un toro de Araúz de Robles; En el 75 un sobre de Jaral de La Mira manso, fué dominado y estrujado, cuando nadie pensaba que tenía faena; En el 76 otro triunfo con reses de Baltasar Ibán.
Se fue en el 77 y volvió en el 80. En Aranjuez le amenazó la muerte que se había llevado a su hermano Joaquin y ya jamás volvió a ser el mismo. Se terminó y se fue.
En 1984 se enemistó con Julio Aparicio, después de un festival en el que torearon los chicos, Aparicio, Rafi Camino y Litri. Desde entonces Litri y Camino andaron juntos hasta que tomaron la alternativa y los padres de Rafi y Litri, jamás se volvieron a hablar.
LE MAITRE PACO CAMINO
Par EL TIO PEPE
L'exception de Manolete, j'ai vu en action tous les toreros notables de 1924 à nos jours, y compris Belmonte et Rafael El Gallo. On dispose donc ainsi de termes de comparaison.
J'ai vu les gracieuses arabesques de Chicuelo et de Pepe Luis Vázquez ; j'ai connu et admiré la maîtrise de Marcial Lalanda et de Luis Miguel Dominguin ; subi l'envoûtement de la puissance prodigieuse de Domingo Ortega ; savouré les véroniques de Gitanillo de Triana, les attitudes sculpturales de Cagancho, la distinction d'Antonio Bienvenida, et je n'ai jamais contemplé toreo plus parfait dans sa beauté idéale que celui d'Antonio Ordoñez. Sans parler de tous ceux qui, en des lieux et à des moments divers m'ont enchanté par l'éclat de leur talent particulier : un La Serna, un Manolo Bienvenida, un Armillita, un Arruza, jusqu'à cet énigmatique Curro Romero et au petit Diego Puerta en qui s'incarnent maîtrise, art et, avant tout, un courage jamais démenti.
Il est bien satisfaisant pour l'esprit, riche de tant de souvenirs accumulés, de saluer, après de longues années d'attente, la consécration définitive du plus grand torero de la jeune génération : le Maître Paco CAMINO. Pour la première année enfin, le «Ah !» de soulagement a effacé le «Quel dommage !» si longtemps murmuré. Tel qu'en lui-même enfin, 1966 a changé l'enfant de Camas. Le voici à cette place que nul, présentement, ne peut lui disputer : la première. Mieux encore, et quoi qu'il arrive désormais, il ne peut plus descendre du podium. J'entends par là qu'on ne pourra plus parler de grands toreros sans prononcer le nom de Paco Camino. L'année qui s'achève lui a enfin permis d'étaler aux yeux des moins avertis toute la gamme des dons qu'il porte en lui : une intuition phénoménale, une connaissance approfondie du toro et des terrains, le sens du geste et du rythme, le goût du joli, du templado, l'art et le style au service de la maîtrise, le courage enfin pour savoir attendre ou pour s'élancer bien droit sur la corne fatidique. Je voudrais y ajouter l'intelligence, et plus encore la volonté. Cette intelligence, nous la connaissions bien, certes, mais elle n'avait trop longtemps servi qu'à résoudre des problèmes : le maximum d'efficacité pour le minimum d'efforts. Ceci non plus ne va point sans mérite, on le sait bien. Mais c'était tout justement le contraire de ce qu'espérait l'Afición. On s'acheminait vers la plaza, le frisson de l'espoir au coeur, et on repartait déçu, frustré, désabusé. Et le nom de Paco Camino ne sonnait pas plus clair, ni plus fort que celui des autres toreros. Unus inter pares. Et maintenant cette intelligence s'étale au grand jour, souveraine maîtresse de l'esprit, au long de ces après-midis à jamais inoubliables de la temporada écoulée.
La volonté ! Il en avait à revendre le jeune novillero qui nous fit dire à Santander, la première fois qu'il y vint toréer : «Celui-ci sera peut-être quelqu'un de très grand». Cette autorité, cette aisance, ce sens inné de la lidia et de la place, l'exacte mesure du geste, la précision de la brega, et puis enfin cette manière étonnante, presque désinvolte, de se «promener au milieu des toros» (ne dirait-on pas qu'il y a parfois plusieurs toros dans l'arène, à voir la maladresse et l'affolement de certains toreros ?), tout cela nous sauta aux yeux dès le premier jour. Je me souviens de m'être alors demandé s'il n'y avait pas du Joselito chez cet adolescent. Jamais, depuis ma lointaine enfance, torero ne m'avait à ce point paru riche de promesses... Hélas ! Comme il fallut tempérer les élans de l'enthousiasme, imposer silence à l'espoir démesuré, au point que la confiance même en fut ébranlée! Tardes sombres de Bilbao et d'ailleurs, parfois éclairées d'un rayon aussitôt voilé qu'aperçu ! Défaites, indifférence, apathie... Le ressort semblait brisé. Une santé déficiente, aggravée par des épreuves morales douloureuses et sans aucun doute imméritées, l'excès de fatigue, les nerfs qui lâchent, tantôt le vouloir qui se dérobe, tantôt le désarroi qui le trahit... Et cette ronde perpétuelle, qui va de soi lorsqu'on se sent fort et qui devient obsession déprimante pour l'homme en proie aux tourments : les gens de l'entourage, les contrats à signer, les hommes d'affaires et les procès, les randonnées interminables de jour et de nuit (cornada sin sangre, dit El Pireo). Cette cadence infernale des horaires à respecter, de tous ces gens à satisfaire, des quémandeurs empressés, ces voraces: tous ces publics avides, ici, là, ailleurs, toujours le même au fond ; un rond, une palissade rouge, des milliers de têtes en toile de fond, et tout ce bruit, et l'autre qui attend derrière la porte... Et moi, Camino, impuissant, désorienté, parodie de moi-même... Ce qui étonne, c'est que depuis son alternative en 1960 Paco Camino se voit maintenu en première file. Il convient donc d'admettre que sa valeur virtuelle n'était nulle part contestée et que subsistait intact le crédit qu'on lui accordait. Il est vrai que de-ci de-là, lorsqu'il se retrouvait lui-même, son talent s'imposait, entraînant l'adhésion des clairvoyants et revivifiant leur espoir. L'incident d'Aranjuez, avec le Cordobés, loin de lui porter préjudice, le replaça au premier plan de l'actualité taurine et beaucoup l'interprétèrent comme l'indice d'un sursaut de volonté de la part du Sévillan. En fait, il semble bien que l'heureuse transformation du jeune maestro soit avant tout le résultat remarquable d'un traitement médical efficace suivi au cours de son séjour aux Etats-Unis. C'est du moins ce qu'un ami, familier du torero, nous a confié.
Et la volonté est enfin revenue. Alors, tout a changé. Le renouveau de la joie dans un corps rendu à sa robustesse naturelle, l'aisance, la souplesse, l'agilité des mouvements ; le bonheur d'être et d'empoigner la vie à plein coeur, à pleines dents, à plein corps ; l'allégresse au combat, et cette sensation puissante de se sentir, de science certaine, le meilleur, et de le prouver. Oreille ; oreilles ; oreilles et queue... Partout, presque partout le triomphe. Peu importent les toros, ceux de Bilbao et ceux de Valladolid, ceux de Valencia ou ceux de Salamanque.
Sa meilleure faena ? Qui le dira, et qui le sait ? Partout où Camino a coupé deux oreilles, et parfois une seule, chacun est persuadé de lui avoir vu réaliser sa meilleure faena, les comptes rendus de presse le démontrent, et c'est probablement vrai. J'ai vu la perfection à Santander, mais à Valladolid aussi. Etait-ce mieux qu'à Nîmes ? Certainement, non.
A Valladolid, le 18 septembre, lorsqu'il s'est laissé tomber à genoux à l'endroit même du brindis à ce bébé dans les bras de sa jeune maman, il a tiré du Galache quatre passes sans bouger enchaînées sur un redondo debout qui m'ont mis les larmes aux yeux, tant il y avait de grandeur et de beauté dans cet affrontement. Prélude à une faena admirable. Mais ces faenas ne les a-t-il pas, cette année, prodiguées ?
Il y a plus. La maîtrise de Camino l'a porté bien au-delà du toreo conventionnel de notre époque, toreo qui ne s'écarte guère, en règle générale, de la banalité. Si j'ose dire, à la période d'application a succédé la période de mutation, celle de son toreo à lui. A l'heure présente, il est impossible de confondre le style de Paco Camino avec un autre, quel qu'il soit. Dans l'exécution de passes, à des moments identiques, il y a le je ne sais quoi qui porte sa marque. Je ne crois pas forcer la vérité en écrivant que le jeune maître a eu le mérite de repenser son toreo et de le remodeler à la mesure de son intelligence et de ses surprenantes facultés. Il me semble, d'ailleurs, qu'il s'agit moins d'invention que d'adaptation. Ainsi des fameuses «trois chicuelinas», prodige de maîtrise, de finesse, de précision, d'élégance, d'art enfin, suffisantes à elles seules pour subjuguer toute une plaza. Si l'on décompose puis reconstitue par la pensée les trois temps de leur exécution, sans en omettre surtout l'imperceptible instant d'arrêt qui marque le centre de la suerte, on a la démonstration d'une virtuosité technique éblouissante et telle que personne auparavant, même pas Chicuelo lui-même, n'avait à ce point conféré à cette fioriture aujourd'hui devenue banale le caractère d'un chef-d'oeuvre sans précédent.
Et nous savons combien le muletero rendrait des points au capeador. Il suffit de bien observer pour comprendre à quel Point Camino se situe hors du commun. Abandonnant à d'autres, moins forts que lui, la tromperie du toreo de profil, sinon pour en jouer, Camino fait des arpèges avec le toreo de face. Quand le toro est brave, il se récrée à nous présenter toute la gamme des attitudes possibles entre la face et le profil, dans ses séries de naturelles et de redondos qui sont autant d'images de la perfection. Mais quelle que soit la position du moment, il est toujours centré avec le toro ; il se croise avec lui.
Expliquons-nous. Tout le toreo est basé sur la différence des axes entre l'homme et la bête. Tandis que l'axe de l'homme est vertical, ce qui le conduit à effectuer un mouvement de rotation, celui du toro est horizontal, et le mouvement de l'animal est un mouvement de translation. Pour toréer vraiment et dominer, l'homme doit s'efforcer d'être (c'est une image) le centre de l'arc de cercle que décrira le toro, afin d'obliger l'animal à effectuer ce mouvement semi-circulaire contraire à son impulsion naturelle, et de ne pas se faire prendre. C'est exactement ainsi que torée Camino au cours des passes décisives de ses faenas, celles où la domination est la condition du succès, et, sans peut-être le savoir, il illustre à la lettre la réflexion d'Armillita «Le difficile et le grand dans le toreo, c'est de se croiser avec les toros. Se profiler comme le faisait Manolete est une duperie». Cette préoccupation de bien se situer au centre de la suerte a conduit le maestro à effectuer un mouvement que je n'avais encore jamais vu exécuter et qui m'a frappé. A Santander et à Valladolid, à deux reprises chaque fois, citant de face, jambes écartées pour une naturelle, Camino a attendu le départ du toro en direction du leurre pour marquer aussitôt un pas de côté vers l'intérieur de la suerte, avant de recueillir la charge dans la muleta, ce qui, on en conviendra, représente une manière inédite de charger la suerte et dénote un pouvoir de domination peu commun. Bien entendu, cette démonstration a été effectuée à la limite des tercios et du centre du rond, et le pas de côté en direction de ce centre. On peut être persuadé que ce procédé n'est pas à la portée du premier venu, ni même de beaucoup de collègues de Paquito.
L'épée en main, le niño de Camas a conservé les qualités qui font de lui un matador habile et parfois remarquable.
Enfin, il a su garder ses distances à l'égard du tremendisme. On admettra sans peine que Camino aurait, s'il le voulait, son mot à dire sur ce mode d'expression d'une certaine forme de courage. Il se borne à des allusions d'une ironie souriante, assuré que rien ne peut égaler la mesure, la sérénité, le bon goût. Et, dans un certain sens, ses affrontements multipliés avec le Cordobés lui auront été salutaires, dans la mesure où les démonstrations extravagantes de celui-ci l'auront incité à parfaire davantage la pureté de son toreo qui se veut oeuvre d'art et maîtrise sans faille.
Je ne suis pas qualifié pour dire si Paco Camino se rapproche de Joselito. On l'a dit, écrit, et je n'ignore point cependant que certains pensent que c'est une idée folle. Probablement Camino n'est-il pas comme Joselito le torero intégral. Il lui manque sans doute l’afición insurpassable du colosse de Gelves. Jamais celui-ci n'eût envisagé de s'enfermer à Madrid face à six toros sans avoir pris la précaution élémentaire de s'assurer en personne que les animaux étaient dignes de lui et de l'événement. Camino ne l'a point fait à la veille du ler octobre, et c'est grave.
Mais il n'en reste pas moins à mes yeux que le jeune Maître supporte la comparaison avec n'importe lequel des grands toreros que j’ai admirés dans le passé.
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